Fortapàsc

Publié le par Patrick Braganti



Biopic des derniers mois de la jeune existence du journaliste italien Giancarlo Siani assassiné en 1985 à l’âge de 26 ans par la Camorra pour avoir mis à jour les liens de corruption entre celle-ci et les politiciens locaux dans une bourgade près de Naples,  Fortapàsc est un film globalement sans inventivité de mise en scène, peinant à trouver le souffle et le lyrisme inhérents à son sujet. A force de dessiner à gros traits le portrait d’un jeune homme tout à fait ordinaire, d’abord dépassé puis accaparé par les événements sur lesquels il enquête, le réalisateur Marco Risi, qui n’est autre que le fils de Dino (Parfum de femme, Les Nouveaux Monstres et Fantôme d’amour constituant les œuvres émergentes d’une longue carrière), ne parvient pas à rendre crédible la vocation soudaine de ce grand adolescent, sorte de Tintin napolitain sympathique, mais sans relief.

 

À l’inverse, les différents clans de la Camorra locale, qui s’entre-déchirent le pouvoir à coup d’éliminations brutales, apparaissent caricaturaux, joués par des comédiens donnant l’impression d’en faire des tonnes. La bêtise suintée par ces petits malfrats orgueilleux et vaniteux s’accorde au final assez mal avec leur sphère d’autorité despotique présumée. Autrement dit, compte tenu de l’image folklorique, à la violence, exagérée et complaisamment mise en scène, que le cinéaste donne des mafiosi, on finit par douter de leur capacité à exercer et conserver la mainmise sur la ville et ses édiles.

Alourdi d’une mièvre bluette (le journaliste et sa petite amie), Fortapàsc ne justifie en rien la convocation référentielle des figures tutélaires Francesco Rosi (Main basse sur la ville en 1963) ou, plus récemment, Matteo Garrone avec l’indépassable Gomorra. Au-delà de la médiocrité manifeste de l’ensemble, recyclant force clichés culturels nationaux (les plats de pâtes, la musique sirupeuse, la drague érigée en art de vivre) juxtaposés à un traitement appuyant avec excès sur la barbarie des truands, on retiendra avant tout l’aspect documentaire du film, exposant l’immobilisme des situations, pour ne pas dire leur aggravation endémique et leur pourrissement irréversible.

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