Katalin Varga

Publié le par cameophilie



Même s’il est britannique, et sans doute parce qu’il implante son premier long-métrage, Katalin Varga, en Roumanie, Peter Strickland semble marcher dans les pas des cinéastes roumains et hongrois dans ses partis pris formels. Sans atteindre la beauté insurpassable de l’œuvre d’un Béla Tarr, Katalin Varga nous fait davantage penser à Delta, autre film hongrois sorti ce printemps, cultivant les mêmes penchants pour une histoire forte, des personnages énigmatiques, une communion élégiaque avec les éléments et une indéniable esthétisation. 

 

Peter Strickland met en scène l’exil d’une femme – Katalin Varga – et son fils Orbán chassés par son époux. Mis au ban du village, ils entreprennent un périple en charrette qui pour Katalin est aussi le motif d’une vengeance : retrouver les hommes qui l’ont violée par le passé, dont l’un serait le père d’Orbán. Non dénué de maladresses, pêchant par une abondance d’artifices (musique pompière et filtrage des couleurs, jeu appuyé et théâtral des comédiens, en particulier le mousquetaire Tibor Pálffy), le film peine à démarrer et donc à nous captiver, malgré la majesté presque pesante des forêts traversées. C’est en s’arrêtant à la ferme où loge un des deux violeurs que le drame se noue, offrant du coup plus de consistance et de chair à des personnages jusqu’alors transparents et peu passionnants. Cependant, Katalin Varga passe d’un extrême à l’autre : de l’épure et du mystère à l’explication qui surligne et appesantit la narration.

 

Ainsi le réalisateur ne parvient-il pas à approcher l’équilibre fragile entre la création plutôt maîtrisée d’une ambiance éthérée et onirique, à la limite du fantastique, et la bifurcation finale vers l’exposé d’éclaircissements qui, s’ils peuvent paraître nécessaires à la compréhension, sinon à la résolution, du film, ne l’entrainent pas moins vers une banalisation qui lui nuit. Peter Strickland aborde sous un angle inhabituel et avec un regard acéré les thèmes de la vengeance et de la rédemption. Le résultat, certes réalisé avec une économie handicapante de moyens, ne convainc pas en totalité : un peu trop de complaisance à se regarder filmer, un peu trop de maniérisme appuyé et de virtuosité étalée.



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